mercredi 7 mai 2014

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2 - UTILISATION DIGESTIVE ET METABOLIQUE DES ALIMENTS partie 1

By: Dr Vétérinaire On: 13:43
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  • II - UTILISATION DIGESTIVE ET METABOLIQUE DES ALIMENTS
     
    II .1- Rappel anatomique du tube digestif des ruminants 
    L’appareil digestif  des ruminants est caractérisé par un estomac très différencié  à plusieurs cavités comprenant quatre parties nettement distinctes extérieurement.
    Ce sont successivement le rumen (ou panse), le réseau (ou réticulum) et le feuillet (ou omasum).Ces trois  premières représentent les pré-estomacs et sont placées avant l’estomac appelé la caillette .Toutes les parties de l’estomac des ruminants dérivent d’une ébauche simple et il faut les considérer comme le résultat d’une différenciation spécifique  et d’une adaptation à la nature particulière de l’alimentation. Les ruminants sont des herbivores qui peuvent digérer les parois des tissus végétaux non lignifiés dont la cellulose est le constituant principal.

    II.1.1- le rumen ou la panse, c’est le plus volumineux, il renferme de 70 à 75 % du contenu  du tube digestif et représente  de 50 à  60 % de son volume. Son volume et celui  du réseau sont d’environ 18 litres.

    II.1.2- le réseau (ou réticulum ) qui doit son nom à sa muqueuse réticulée et parsemée de papilles absorbantes , joue un rôle central dans la circulation des particules .Les particules qui franchissent l’orifice réticulo-omasal doivent avoir une taille moyenne inférieure ou égale à  1 mm. De ce fait , les aliments solides sont donc séquestrés tant qu’ils n’ont pas atteints cette taille minimale .( Pearce 1967 , Ulyatt 1983 , Reid 1984 , Ulyatt et al.,    1985 ) cités par  Sutherland, 1986 ; Thivend et al.,     1985.

    II.1.3- le feuillet (ou omasum) : il doit son nom de feuillet au fait qu’il est presque entièrement occupé par des lames parallèles, de hauteurs inégales, disposées dans le sens du transit alimentaire. D’un volume égal à 0,5 l, c’est  un organe ovoïde chez le mouton à l’intérieur  duquel on trouve de très nombreuses lames recouvertes d’un épithélium kératinisé possédant également des papilles. Il communique en aval avec la caillette par un orifice large et dilatable

    II.1.4- La caillette est le seul réservoir sécrétoire de l’estomac des ruminants .Sa cavité est tapissée par une muqueuse glandulaire, analogue à celle des monogastriques toujours recouverte d’une couche de mucus .Les fonctions digestives de la caillette des ruminants sont analogues à celles de l’estomac des mammifères mono-gastriques .Elle a un volume inférieur à 2 litres .L’ensemble de ces réservoirs ont une capacité de 12 à 20 litres chez le mouton.

    II.1.5- L’intestin
    Il est divisé en deux parties :
    ·               L’intestin grêle est très long. Il comprend le duodénum (0,6 à 1,2 m) avec son anse duodénale qui reçoit les sécrétions biliaires et pancréatiques  et l’ensemble jéjunum-iléon (17,5 à 34,0 m) (Nickel et al.     1987).Sa structure est identique à celle de l’être humain .Les mécanismes de la digestion et de l’absorption dans l’intestin grêle sont les mêmes que chez les mono-gastriques.
    ·      Le gros intestin comprend le cæcum, le colon sigmoïde, le colon spiral, le colon flottant et le rectum .Le gros intestin ne secrète pas de sucs digestifs.

    II .2-  DIGESTION DANS LE RUMEN – RESEAU
    La digestion est réalisée grâce à des enzymes cellulolytiques  que les micro-organismes  du rumen, du réseau  et du gros intestin peuvent sécréter. La présence de la dégradation microbienne dans les pré-estomacs avant la digestion (chimique) par les sécrétions digestives dans la caillette modifie  fortement la digestion  et l’utilisation des aliments par les ruminants par rapport aux mono-gastriques.
    La digestion chez les ruminants met en jeu des phénomènes mécaniques, des phénomènes fermentaires ou encore biologiques en relation avec la présence d’une flore (au niveau du rumen - réseau) et enfin des sécrétions enzymatiques en relation avec les sécrétions digestives (dans la caillette et l’intestin grêle comme chez les mono-gastriques).
    L’ingestion des aliments par les poly-gastriques (qui dure environ 8 heures par jour avec une mastication rapide au cours de la quelle les aliments s’entassent dans le rumen) est suivie par la rumination.
    La rumination est un état physiologique défini comme un phénomène cyclique qui se déroule en quatre étapes :





    Ce diagramme montre les flux de la matière sèche à travers le rumen du mouton alimenté avec 1020g de foin haché de luzerne dans un intervalle de 24 heures

    a- La régurgitation du bol alimentaire comportant deux phases :
    * Une phase d’aspiration  œsophagienne au cours de laquelle le réseau se contracte ce qui amène le contenu du rumen au niveau du cardia. Le cardia s’ouvre et l’animal inspire fortement créant une dépression intra-thoracique. Cette dernière permet au contenu du rumen de remonter dans l’œsophage.
    * Une phase d’expulsion vers la bouche, due à une onde antipéristaltique accompagnée d’une expiration profonde.
    b- La déglutition de la partie liquide servant de support.
                c- La mastication  mérycique au cours de laquelle les mouvements sont lents et la salivation sont abondantes.
                d- La phase de repos.
    Il existe 6 à 8 périodes de rumination  par jour, en moyenne de 40 à 50 minutes chacune.
    La rumination est indispensable car elle fragmente les aliments et facilite l’attaque par les micro-organismes du rumen. La complexité anatomique de ces réservoirs est associée à la présence d’une population dense et stable de micro-organismes qui vivent en symbiose avec l’hôte et qui jouent un rôle dans la digestion et la nutrition de l’animal. La mise en place et le maintien de cette population microbienne sont dus au fait qu’il existe une séparation physique  entre la zone de sécrétion acide (estomac ) et le reste des préestomacs  où la digestion microbienne peut avoir lieu en permanence (Jarrige 1995 b).
    II .2.1- Le contenu du milieu ruminal
    Le contenu du milieu ruminal est relativement constant, il se caractérise par :
    -          une concentration élevée en eau  85 à 90 % ;
    -          une température constante de 39 à  40° C ;
    -          un potentiel d’oxydo-réduction variant entre de – 250 à  - 400 mV (milieu fortement anaérorobie) ;
    -          un pH généralement  compris entre 6 et 7 qui est tamponné par l’apport régulier de grandes quantités de bicarbonates et de phosphates contenus dans la salive ;
    -          une pression osmotique constante proche de celle du sang ;
    -          un apport régulier de nutriments et d’eau fournis à la fois par l’ingestion des aliments et par la rumination ;
    -          une élimination continue des produits du métabolisme , soit par absorption  à travers la paroi du rumen ( acides gras volatils , ammoniac ) ,  soit par passage dans la partie postérieure  du tube digestif (résidus alimentaires, cellules microbiennes ), soit par éructation ( méthane ,gaz carbonique ) ;
    -          une relative constance de l’atmosphère gazeuse située au niveau du sac dorsal (gaz carbonique : 60 –70 %  , méthane : 30 – 40 % ) ;
    -          un brassage permanent  assuré par les contractions périodiques de la paroi et par la rumination.
    Le rumen est donc un milieu particulièrement bien adapté  au développement d’une population microbienne anaérobie dont les principaux constituants sont les bactéries et les protozoaires. (Thivend et al.    1985, ITEB-INRAP  1984 ;  Russel 1986, Preston et al.    1987).

    II.2.1.1-  Les protozoaires.
    Ce sont principalement des ciliés  dont la taille varie de 20 à 200µ mais on observe aussi des flagellés en nombre réduit. Le nombre total des protozoaires se situe aux environs de 100.000 à  1000000 (ITEB-INRAP,  1984) ou 2 à 5000000 par ml de jus de rumen (Thivend et al.    1985). Les protozoaires ciliés sont capables de transformer un grand nombre de constituants alimentaires et bactériens en métabolites et en composés cellulaires qui seront ensuite utilisés par l’animal hôte .Ils appartient à deux groupes, les Holotriches et les Entodiniomorphes.
    Ces protozoaires sont capables pour la plupart d’entre eux de dégrader la  cellulose, les hémicelluloses, les pectines pour les entodiniomorphes et les sucres solubles pour les Holotriches. Les ciliés sont également protéolytiques, ils utilisent aussi les acides aminés (Coleman 1980 cité par Thivend et al.1985) mais leurs besoins azotés sont en grande partie couverts par l’ingestion des bactéries .Les protozoaires sont généralement libres dans le liquide du rumen mais certains se fixent également aux particules alimentaires (Beauchop et al. 1976 cités par Thivend et al. 1985). Ils sont très sensibles aux conditions régnant dans le rumen et aux caractéristiques de la ration. Avec des rations riches en glucides solubles ou en amidon, ils peuvent représenter au maximum 50 %  de la biomasse du rumen, et ils régressent avec les rations très pauvres en constituants solubles. Ils peuvent disparaître avec des rations créant des pH bas du rumen (< 5,5) aliments concentrés distribués à volonté et / ou séjournant pendant un temps très court dans le rumen (fourrages broyés).

    II.2.1.2- Les bactéries
    La population bactérienne du rumen est comprise entre 8 et 10 milliards cellules par ml de contenu ruminal. Elle constitue environ 50 % de la biomasse microbienne et représente la catégorie des micro-organismes la plus complexe et la plus importante. Elle est composée essentiellement de bactéries anaérobies strictes non sporulées et elle est caractérisée par sa très grande diversité .En 1959 on en dénombrait 39 genres et 63 espèces et actuellement plus de 200 espèces bactériennes ont été isolées du rumen mais seulement une trentaine d’entre elles peuvent être considérées comme des bactéries authentiques du rumen alors que les autres  sont apportées par les aliments et sont présentes d’une manière transitoire (Russel et al.,     1981cités par Thivend et al.,1985 ;  Russell  1986 ).
    Les bactéries du rumen sont généralement classées en fonction des substrats qu’elles sont capables de fermenter ou de dégrader; on peut citer les  bactéries cellulolytiques, pectinolytiques, amylolytiques, uréolytiques …
    Les fonctions de plusieurs espèces se recouvrent largement ce qui contribue à la stabilité de l’ecosystème. Cependant certaines d’entre elles sont plus spécialisées telle que Anaerovibrio lipolytica qui n’hydrolyse que les lipides et ne fermente que le glycérol ou bien les Veillonella  qui utilisent principalement le lactate  (Hungate 1966 cité par Jarrige 1995a), Vibrio succinogenes  ne tire son énergie que de la réduction du fumarate en succinate (Thivend et al.     1985).
    De nombreuses espèces sont protéolytiques, plusieurs d’entre elles utilisent ou dégradent les acides aminés ou les peptides. (Russell 1986. Preston et al. 1987)
    Dans le rumen, les bactéries occupent trois biotopes distincts : elles peuvent être libres dans le liquide ruminal, ou attachées soit à la paroi interne du rumen, soit aux particules alimentaires alors que d’autres espèces vivent liées à la surface des protozoaires environ 1 à10%  de la flore totale  (Imai et Ogimoto, 1978 cités par Jarrige et al. 1995b.)
    Les bactéries attachées aux particules alimentaires représentent environ la moitié de la population bactérienne selon  Minato et al.1966 cités par Thivend et al. (1985), elles concernent principalement celles qui hydrolysent les polymères pariétaux. Les bactéries adhérentes à la paroi du rumen appelée flore épimurale sont caractérisées par leur forte activité protéolytique (Dinsdale et al. 1980 cités par Thivend et al.  1985) et uréolytique
    (Mc Cowan et al, 1980 cités par Thivend et al. 1985 ; Wallace 1986).
    Ses bactéries ont un rôle primordial parmi lesquels, on citera :
    ·         L’hydrolyse de l’urée qui diffuse à travers la paroi du rumen.
    ·         La dégradation des cellules épithéliales  fortement kératinisées provenant de la desquamation de la muqueuse du rumen.
    ·         L’élimination de l’oxygène  qui diffuse à travers la paroi du rumen depuis la voie sanguine([ Dinsdale et al., 1980 , Mc Cowan et al., 1980] cités par Thivend et al.,  1985).Ces bactéries sont aussi très riches en phosphatase alcaline ( Fay et al.,1979 cités par Thivend et al., 1985).
    Lorsqu’un animal consomme un régime alimentaire uniforme, il s’établit dans son rumen, après une période d’adaptation, une population  microbienne de composition relativement constante, qu’on peut appeler un faciès microbien. L’état d’équilibre est assez fragile et conditionne l’efficacité de la digestion.  




    II.2.1.3- Autres micro-organismes
    II.2.1.3.1- Les champignons
    L’existence des champignons anaérobies dans le rumen a été démontrée par Orpin en 1977 et Bauchop 1979, Joblin 1981 cités par Thivend et al.     1985. Bauchop a indiqué que ces champignons étaient liés à la fraction  solide du contenu du rumen et que l’importance de leur effectif dépendait de la présence de fourrages grossiers dans la ration .Ils existent chez les animaux nourris avec des aliments succulents ou qui pâturent  une herbe jeune (Jouany, 1981 et Czerkawski., 1984).  La plupart  de ces micro-organismes apportés par l’aliment seraient simplement en transit dans le rumen Certains Phycomycètes anaérobies stricts joueraient un rôle non négligeable dans la dégradation des polyosides pariétaux  (Bauchop 1981 et Orpin 1984 cités par Thivend et al.1985 ; Jarrige et al, 1995b) et probablement dans la dégradation du méthane (Preston et al. 1987).

    II.2.1.3.2-  Mycoplasmes, virus et  bactériophages 
    Ils sont présents dans le rumen mais leurs rôles restent  à élucider surtout pour les mycoplasmes .Selon Thivend  et al.   1985, les bactériophages tempérés et virulents peuvent jouer un rôle dans l’écologie du rumen .A la suite d’une infection  par un phage virulent, une espèce bactérienne peut devenir sous dominante Son action pourra cependant être compensée par la prolifération d’une espèce non sensible, capable d’occuper la même niche écologique

    II.2.2- La dégradation des glucides
    Grâce à un extraordinaire équipement enzymatique, la population microbienne du rumen et du réseau  hydrolyse tous les glucides en oses (hexoses ou pentoses). Les glucides solubles sont hydrolysés de manière très rapide et en totalité (amidon des céréales est dégradé à 90 – 95 %  dans le rumen par une amylase bactérienne). La population microbienne dégrade aussi les glucides des parois (cellulose, hémicelluloses et pectines) en oses qui sont ensuite fermentés en anaérobiose selon des voies bien connues (voir schéma du métabolisme des glucides pariétaux dans le rumen). Cette dégradation par des cellulases que seules les bactéries sont capables de synthétiser, est lente et partielle (de 80 à 90 % pour les fractions pariétales pour un aliment très peu lignifié comme l’herbe jeune, à  40 50 % pour une plante riche en lignine comme la paille). Cette hydrolyse libère du cellobiose  (2 ß glucose), du glucose et des pentoses. La population microbienne du rumen –réseau tire de la fermentation des oses provenant de l’hydrolyse des glucides pariétaux, l’énergie (ATP) et le carbone qui lui sont nécessaires pour son entretien, sa croissance et sa prolifération. Les produits de cette fermentation sont un mélange d’acides organiques à courte chaîne, dits acides gras volatils, essentiellement acétique, propionique et butyrique ,et des gaz (gaz carbonique et méthane ).Les produits intermédiaires (acides succiniques et lactique ) sont généralement utilisés par les microbes au fur et à mesure de leur formation .Le ruminant trouve la majeure partie de l’énergie dont il a besoin dans les acides gras volatils (AGV ) issus de la dégradation des glucides .Ils peuvent lui fournir de 65 à 75 % de l’énergie absorbée .
    Avec  les régimes habituels à base de fourrage utilisés par les ruminants, les proportions relatives des AGV sont les suivantes (en % molécules)
                - Acide acétique (C 2)                60  à   70 %
                - Acide propionique (C3)         15  à   20 %
                -  Acide butyrique  (C4)           10  à   15 %
                - Autres AGV                              2  à      5 %
    Les gaz formés au cours des processus fermentaires, CO2 et CH4 représentent des pertes énergétiques pour les ruminants et sont rejetés par éructation.
    La production de ces gaz dépend de l’intensité des fermentations microbiennes ; elle augmente ainsi avec la digestibilité de la matière organique  de la ration et diminue en fonction des facteurs qui limitent le temps de séjour des aliments dans le rumen (comme le broyage, l’agglomération, l’action des agents chimiques ou biologiques). La diminution du temps de séjour, modifie le temps de contact enzyme-substrat, accroît la surface pariétale accessible aux enzymes  et réduit le nombre et la force des glucides –lignine qui limitent l’action des micro-organismes (Czerkawski 1984 ; Thivend et al.     1985 ; Jarrige et al.     1995b).





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