REPUBLIQUE
ALGERIENNE DEMOCRATIQUE ET POPULAIRE
UNIVERSITE DE BATNA
FACULTE DES SCIENCES
DEPARTEMENT VETERINAIRE
LABORATOIRE DE
NUTRITION - ALIMENTATION
COURS
DE NUTRITION ANIMALE
DEUXIEME ANNEE DOCTEUR
Par
DR MEZIANE TOUFIK
Maitre de conférences
III- DIGESTION APRES LE RUMEN –RESEAU
III.1-
Dans le feuillet : Longtemps considéré comme un lieu de
passage et non d’absorption des nutriments. Le feuillet se remplit de façon
cyclique par l’orifice réticulo-omasal qui laisse pénétrer les particules
fines. Une partie des digesta s’écoule vers la caillette mais les deux tiers
environ du flux digestif séjournent entre les lames du feuillet pendant une
durée sans doute variable. La fraction ADF(Acid Detergent Fiber ou
lignocellulose ) indigestible séjourne environ 2 heures dans le feuillet
(Holtenius et al., 1989).
Les digesta qui pénètrent dans
l’omasum ont pour origine le contenu du plancher du réticulum et ont une teneur
en matière sèche très faible de 3 à 8 %
( Moir, 1984 cité par Deswysen et al.,1995). Ce contenu réticulaire est renouvelé à chaque
contraction par des digesta provenant du sac crânial du rumen ( Baumont et al.,
1991 ).
L’absorption des
nutriments au niveau du feuillet fut étudiée par Engelhardt et Hauffe en 1975 cités par Deswysen (1995 ) qui ont démontré
l’absorption de l’eau à ce niveau chez le mouton et la chèvre. Beaucoup
d’auteurs ont montré que l’absorption omasale est réelle pour l’eau , les
électrolytes et les AGV qui ont échappé à l’absorption du rumen et qui
représentent environ 10 % de la production totale des AGV dans les pré-estomacs du mouton (Engelhardt
et al., 1975 cités par Deswysen,
1995).
En utilisant des
marqueurs avant l’abattage des animaux Holtenius et al.,1989 ,
calculèrent une absorption omasale de l’eau séjournant dans l’espace
interlamellaire de 15 % chez le mouton. Mais, en raison du passage direct d’une
partie du liquide par le canal omasal, la proportion d’eau réellement absorbée
dans le feuillet est de 8 %. Environ 50 % des AGV qui pénètrent dans le
feuillet sont absorbés.
La concentration
des micro-organismes en µg ADN /ml est de 60 % supérieure à celle du rumen avec
une activité fermentaire moindre et qui a une vitesse de 50 % inférieure à celle du rumen (Giesecke
et Engelhardt 1975 cités par Deswysen et al., 1995) .Par contre la concentration des
protozoaires n’est que de :
·
14 % du flux d’entrée
omasal chez le mouton (Weller et Pilgrim 1974 cités par Deswysen et al. 1995)
·
11 à 17 % du contenu omasal
interlamellaire (Town et Nagaraja
1990 cités par Deswysen et al, 1995).
·
6.7 % de l’effluent omasal
chez le mouton (Mc Sweeny, 1986)
Tableau n° 8 : Absorption
et sécrétion de différents électrolytes et minéraux dans le feuillet
[de 04 moutons et 02 chèvres (Von Engelhardt et Hauffe, 1975
b) et de 04 jeunes bovins
(Edrise et Smith, 1979) en % de l’effluent réticulaire
pénétrant dans le feuillet]
Cités par Deswysen et al,
1995.
|
Moutons
|
Chèvres
|
Bovins
|
Poids vif(kg)
Absorption (%)
* Eau
* Sodium
* Potassium
* Phosphate
* Ammoniac
* Magnésium
* CO2
Sécrétion (%)
* Chlore
|
50 – 60
13.1
26.0
9.0
9.7
34.0
-
49.0
96.0
|
70 – 90
11.6
19.0
8.1
119.0
|
100 – 120
43.3
53.9
15.6
23.3
20.5
186.3
|
III.2-
Dans la caillette :
Chez les
ruminants , les aliments solides sont profondément dégradés dans le
rumen-réseau sous l’action des micro-organismes
et les corps bactériens constituent une part très importante de produits
qui arrivent dans la caillette .Les digesta arrivent librement dans la
caillette et y séjournent très peu (30
à 60 minutes ).Du fait du transit
plus régulier et de la sécrétion plus importante d’acide chlorhydrique , le
pH de la caillette fluctue moins et est
en moyenne plus bas ( 2 à 3 ).Ces conditions sont plus favorables à la
dénaturation des matières azotées et à l’hydrolyse des protéines sous l’action
de la pepsine mais le temps de séjour très bref a l’effet inverse .L’acidité du
milieu tue les protozoaires .Le lysozyme joue un rôle important chez le
ruminant puisqu’il est sécrété en abondance , il intervient dans la lyse
des parois bactériennes et facilite ainsi la dissociation des bactéries fixées
et des particules .On estime chez le mouton entre 30 à 70 % des microbes (
bactéries et protozoaires ) fixés aux particules provenant du rumen qui sont détachées
dans la caillette (Yang, 1991 cité par
Toullec et Lalles, 1995). L’absorption porterait aussi sur les AGV non absorbés
dans le feuillet (ITEB –INRAP, 1984).
III.3- Dans l’intestin grêle
Les mécanismes
de digestion et de l’absorption dans l’intestin grêle sont les mêmes que chez
les monogastriques .Les enzymes du suc pancréatique (les trypsines ,les
chymotrypsines A ,B , C , l’élastase , les carboxypeptidases A ,
B , la lipase plus colipase , la cholestérol estérase , l’amylase , la
ribonucléase , la désoxyribonucléase ) et de la muqueuse intestinale(
aminopeptidase A et N , la phosphatase alcaline , la lactase , la maltase
et l’isomaltase ) sont les mêmes , par
contre les substances pénétrant dans
l’intestin grêle sont différentes .Il faut toutefois noter que le pancréas des
ruminants secrète beaucoup plus de nucléases que celui des mono-gastriques
III.3.1- Les glucides : on
trouve à l’entrée de l’intestin grêle :
*de l’amidon qui est hydrolysé en maltose puis en
glucose et il est absorbé .La quantité de glucose absorbée représente moins de
1 % de l’énergie des nutriments absorbés avec les fourrages seuls. Elle ne
devient notable qu’avec des rations mixtes contenant du mais et du sorgho. Le ruminant doit donc
synthétiser la quasi-totalité ou la majeure partie du glucose dont il a besoin.
On estime que l’apport alimentaire de glucose fournit en moyenne 5 % de l’énergie absorbée.
*des glucides
pariétaux non dégradés dans le rumen – réseau et qui ne seront pas aussi
dégradés au niveau de l’intestin grêle.
*Les résidus des polyosides de réserve des bactéries (ITEB
–INRAP, 1984).
III.3.2- Les protéines
Les protéines qui arrivent au niveau du duodénum sont de deux types :
alimentaires et microbiennes. Il est admis que 80 % des protéines microbiennes
se trouvent sous forme de protéines vraies et 20 % sous forme d’acides
nucléiques qui n’auraient aucune valeur pour l’animal (ITEB-INRAP, 1984). La
digestion et l’absorption des protéines auraient lieu principalement dans le
deuxième tiers de l’intestin grêle ; elles seraient donc faibles dans
l’iléon malgré ses capacités élevées entre autre un pH de 7.5 favorable à
l’action des enzymes protéolytiques (Toullec et al, 1995).
L’analyse de 405 bilans réalisés sur des moutons, jeunes bovins et vaches
laitières recevant des rations mixtes ou des fourrages verts distribués seuls,
le flux d’azote à l’entrée du duodénum est pour
- 56 % d’origine microbienne (37 à 88 %)
- 38 % d’origine alimentaire (10 à 60 %)
- * 6 %
d’origine endogène (Toullec et al,
1995).
La digestibilité
des protéines dans l’intestin grêle varie considérablement de 0.5 à 0.80. (Vérité et al, 1987). Elle est
estimée à 0,80 pour les protéines
d’origine microbienne et
De 0.25 à 0.95
pour les protéines alimentaires.
Pour un niveau
d’alimentation donné, elle est liée positivement au flux duodénal de protéines et négativement au flux iléal de matière non
protidique (Van Bruchen et al, 1985
cités par Toullec et al, 1995).
Les protides qui
échappent à la digestion dans l’intestin grêle sont donc constitués
principalement de fractions communes d’origines bactérienne et endogène,
auxquelles vient se rajouter une fraction d’origine alimentaire, moins
importante et de composition variable
(Greife et al, 1985
et Lallès et al, 1990 tous deux cités par Toullec et al, 1995).
III.3.3- Les lipides :
Les lipides sont
efficacement digérés dans l’intestin , grâce à la bile et au suc
pancréatique ; la bile joue un rôle particulièrement important en
apportant des phospholipides qui facilitent la mise en solution micellaire des
acides gras insaturés .Dans le duodénum ,l’apport de lipides par la bile
entraîne une augmentation marquée des quantités d’acides gras insaturés ,de
phospholipides et de cholestérol (Noble, 1981 ; Bauchart, 1993 ; Doreau et al.,
1994 tous cités par Toullec et al.,
1995).
Chez le mouton,
la quantité totale de lipides ainsi sécrétée équivaut à environ 50 % de la
quantité ingérée avec des rations classiques non supplémentées en lipides. La
digestion des lipides se produit dans un milieu bi-phasique constitué d’une
phase particulaire insoluble et d’une phase micellaire soluble. Cependant et
contrairement à ce qui est observé chez les
pré-ruminants
,la phase insoluble n’est pas une émulsion de globules gras stabilisée par les
phospholipides et les sels biliaires , puisque les lipides sortant de la
caillette sont liés à des débris végétaux , à des corps microbiens ou à des
cellules desquamées. Les acides gras non estérifiés sont progressivement
transférés dans la phase micellaire soluble, grâce à l’action détergente des lyso-lécithines et
des sels biliaires. Cependant très peu de données sont disponibles sur la
digestibilité des lipides dans l’intestin grêle (Doreau et al, 1994,
Toullec et al, 1995). Le plus souvent,
les mesures ont été effectuées à l’entrée du duodénum et dans les fèces or le
passage dans le gros intestin entraîne des modifications profondes et variables.
III.4 – Dans
le gros intestin
Le contenu du
gros intestin constitue un milieu très favorable pour le développement d’une
digestion microbienne .La température y est constante et le pH , peu variable
,reste voisin de la neutralité (6.6 à 7.8 ).Le cæcum se remplit par
intermittence chez le mouton : le flux digestif sortant de l’iléon
terminal peut atteindre de 70 à 90 g en 10 mn , être suivi
d’un arrêt de 30 à 60 mn , et n’est pas en liaison directe avec les activités
d’ingestion ou de rumination (Ulyatt et al.,
1975 cités par Tisserand et Demarquillly 1995 ).
Des
contractions coordonnées péristaltiques et antipéristaltiques assurent le
mélange du contenu du cæcum à la cadence de 3 à 7 par période de 10 mn (Mac Rue
et al., 1973 cité par Tisserand et
al., 1995) .Des vagues de 2 à 5 contractions intenses à des intervalles de 30mn
à 4 heures assurent la vidange du cæcum (Ruckebush 1970 cité par Tisserand et
al., 1995)
Les céréales
diminuent l’activité du cæcum chez les moutons et les bovins et ce
vraisemblablement par suite d’une fermentation cæcale accrue ou anormale .Le
temps de séjour des digesta dans le gros intestin du mouton varie de 10 à 29 heures,
comparable à celui de la phase liquide
du rumen réseau, mais plus court que celui de la phase solide dans le même
compartiment. Il diminue quant le niveau de l’ingestion augmente. (Ruckebush
1970 et Svendsen 1972 cités par Tisserand et al, (1995). La population
microbienne du gros intestin est caractérisée par des bactéries peu différentes
de celles du rumen - réseau mais en quantités moins importantes (Ulyatt et al, 1975,
Hoover 1978 cités par Preston et al, 1987 et par Tisserand et al, 1995). La
présence de protozoaires reste
incertaine et il existe peu de données sur les champignons bien que certains
auteurs signalent leur présence dans le gros intestin des grands ruminants
(Kern et al, 1974, Allison et al, 1975 cités par Tisserand et al, 1995)
Tableau n° 9: Temps de séjour
des aliments dans le gros intestin
(Tisserand
et al. 1995)
Ration
|
Temps de
séjour
|
Herbe séchée
(Combe et Kay 1965)
560 g/j
1000g/j
|
22 h 46
11 h 10
|
Foin de luzerne(Grovum et Hecker 1973)
400g/j
800g/j
1200g/j
|
29 h
17 h 35
11 h 30
|
III.4.1- Les glucides
Seuls les
glucides pariétaux (cellulose et hémicelluloses) non digérés dans le rumen
arrivent dans le gros intestin, aucun glucide soluble n’est détecté dans les
digesta de l’iléon lorsqu’on est en présence d’une ration à base de fourrages classiques.
(Beever et al., 1972 cités par Tisserand et al., 1995). Cependant , la quantité de glucides
solubles arrivant dans le gros intestin peut augmenter avec des rations à base
de céréales et surtout le mais et le sorgho où une grande quantité d’amidon
peut échapper à la dégradation ruminale .La population microbienne du cæcum et
du colon utilise ces glucides en produisant des
acides gras volatils comme dans le rumen mais avec une quantité moindre
.Les AGV absorbés à ce niveau représentent une fraction très variable , de 4 à
26 % de l’énergie totale digérée (Thomas et Rook 1977 cités par Tisserand et
al., 1995).
Tableau n°10 : Pourcentage
molaire des AGV dans le côlon et le
cæcum
(Faicheney
1969 cité par Tisserand et al., 1995).
|
Acétique
|
Propionique
|
Butyrique
|
Cæcum
Côlon
proximal
|
68.8
72.1
|
18.4
17.2
|
8.7
7.2
|
D’après Beever et al., 1972 cités par Tisserand et al., 1995, la digestibilité de la cellulose et
des hémicelluloses dans le gros
intestin de mouton (en % des quantités
qui y entrent ) est estimée de :
·
18.5 à 49.5 % pour la
cellulose
·
24.9 à 48.1 % pour les
hémicelluloses
Cependant les
quantités qui y sont digérées, représentent de :
·
3.0 à 29.6
% pour la cellulose
·
7.9 à 41.1
% pour les hémicelluloses, des quantités
digestibles dans la totalité du tube digestif.
III.4.2-Les protéines
La quantité
d’azote qui arrive dans le cæcum représente : 25 à plus de 50 % de la
quantité d’azote ingérée (surtout avec les rations pauvres en azote) Ulyatt et al,
1975 cités par Tisserand et al. (1995). La moitié de cet azote est sous forme
soluble, jusqu’à 17 % sous forme
ammoniacale .Les protéines représentant 40 à 80 % de cet azote, sont d’origine alimentaire,
microbienne et endogène auxquelles il
faut ajouter l’azote provenant du mucus sécrété par la paroi du gros intestin,
les cellules desquamées et surtout l’urée provenant du sang et diffusant à
travers la paroi. (Tisserand et al. 1995)
Les bactéries
du cæcum et du côlon proximal ont une importante activité de protéolyse, de désamination,
de décarboxylation et d’uréolyse. La dégradation des protéines aboutit à la formation des acides aminés eux mêmes
dégradés en ammoniac, acides gras volatils
et méthane (Mason et al, 1981). Selon Dixon et Nolan (1982) cités par
Tisserand et al, (1995), plus de 3
g de azote ammoniacal sont produits par jour dans le
cæcum et le côlon proximal du mouton dont un quart provient de l’urée endogène.
D’après Mac
Neil 1988 cité par Tisserand et al.,
(1995) , le métabolisme de l’azote dans le gros intestin apporte peu d’acides
aminés à l’animal ( 6 % maximum des apports ) mais le gros intestin participe
de façon importante au reecyclage de l’urée participant de ce fait pour 40 % au
transfert net d’azote de l’ensemble du tube digestif aux liquides corporels.
Tableau n° 11 :
Transfert net d’azote du tube digestif aux
liquides corporels chez le mouton recevant des fourrages (Mazanov
et Nolan 1976 cités par Tisserand et al.,
1995)
Source
|
g N/j
|
Rumen
Intestin grêle
Cæcum
Rectum
% provenant du gros intestin
|
3.30
0.45
2.15
0.40
38.9
|
Le gros
intestin qui n’a fait l’objet que d’un
nombre réduit d’études, comparativement au rumen, joue apparemment un rôle important dans le
recyclage de l’ammoniaque avec un rôle non négligeable dans la digestion des
parois végétales dans le cas d’une diminution du temps de séjour des digesta
dans le rumen suite à un niveau alimentaire élevé ou aussi lors de la
diminution de l’activité cellulolytique
entraînée par des régimes riches en amidon rapidement fermentescible.(
Tisserand et al., 1995 )
III.4.3-Absorption d’eau et de minéraux.
Le gros intestin joue un rôle important dans l’absorption de l’eau et de
certains minéraux majeurs comme chez toutes les espèces. Chez les ruminants environ 90 % de l’eau entrant dans le gros
intestin du mouton y est absorbée, la teneur du contenu du gros intestin
décroît régulièrement de 7.1g d’eau par g de MS
dans le cæcum à 1.5g dans le rectum chez le mouton [Kay et Pfeffer., 1970,
Grovum et Hecker., 1973] cités par Tisserand et al, (1995).
Le gros
intestin est aussi un lieu d’absorption de nombreux éléments minéraux avec une
prédominance d’absorption du sodium, en grande partie d’origine endogène, du
phosphore, calcium, et magnésium ainsi que le chlore alors que le potassium n’y
est que faiblement absorbé .Il existe aussi une absorption importante des
oligo-éléments comme le zinc, cobalt, cuivre et du manganèse (Hoover 1978 cité
par Tisserand et al, (1995)
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